La Voyance dans les traditions africaines

La vie est un constant devenir

Cette vie peut se décliner de trois différentes manières que sont : primo, la vie des plantes, qui se limite à la croissance et la reproduction avec leurs semences et leurs fruits, puis se dessèchent pour mourir. Secundo, il y a la vie des animaux, des bêtes qui sont pourvues de mobilité, se multiplient , communiquent par des cris, et vivent solitaires ou en meute, instinctivement pour fuir devant le danger, aller à la recherche de leur nourritures ou d’un abri. Elles sont incapables d’assurer des lendemains, même si certaines peuvent faire des réserves de nourritures, fabriquer leur nid, leur trou, leur antre, ou produire du miel, une ébauche du travail inchangée depuis des millénaires. Troisièmement, la vie humaine qui se reproduit et comme son Créateur parachève la création du monde par son travail, à sa convenance en assumant des lendemains toujours incertains qui suscitent une angoisse à maitriser par l’accumulation des accessoires qui laisse l’homme sur sa faim de posséder encore plus. Cette idée du futur, du temps qui passe, inscrite dans notre inconscient engendre la religion dont la vie végétale ou animale est dépourvue. Pour l’Africain, un monde existe au-delà de la tombe. Les morts ne sont pas morts. Si la tombe est la destination du mortel en nous, c’est le départ de l’immortel vers la maison du Père, sa provenance, et comme un esprit, demeure concerné par notre existence terrestre. C’est pourquoi, pour les évènements importants de la vie … la maladie, le décès, le mariage, la réussite ou l’échec etc.… la divination s’impose pour connaître l‘intention des ancêtres pour décider d’un sacrifice requis ou pas. D’où le rôle de la voyance dans nos traditions africaines en relation avec l’invisible qui détient une certaine autorité sur nos destins. Les arts divinatoires ont un rôle important sur l’état mental des individus en rassurant ou en alarmant. Il y’a certes l’écoute, durant les séances. L’écoute, permet d’évaluer la personnalité du client pour répondre à sa demande. En fait, les cartomanciens, les marabouts, les astrologues et autres, sont de fins psychologues qui détiennent l’art de manier la parole et le silence. Ce sont des psychothérapeutes informels qui sont efficaces dans le registre de la santé mentale dans nos pays. La voyance trouve son importance dans le diagnostic et le traitement des maladies dans la pratique de la médecine traditionnelle basée sur la voyance. L’on devient voyant par hérédité, le plus souvent du père au fils, ou encore par la naissance de jumeaux, de triplets ou par le siège. Ces naissances requièrent un culte et des interdits qui signifient : « qu’il faut contrôler ses instincts pour être maître de son destin ». Ce destin est l’objet d’exploration par la voyance. L’instinct fait l’économie du discernement et du jugement des valeurs. La voyance éclairerait l’individu sur son impondérable. La voyance fait partie des us et coutumes de l’Africain, c’est une composante de sa culture. Elle n’est pas une idolâtrie. Car il ne faut pas confondre culte et culture. Les sacrifices requis dans la voyance sont propitiatoires pour accomplir un devoir de mémoire des esprits et non pour les adorer. Il est à déplorer la cupidité de certains devins qui exploitent la naïveté ou la détresse de leur client. Ce serait le cas de certains marabouts que l’on retrouve même dans les Caraïbes pour profiter des séquelles de la religiosité des ancêtres de ces populations. En somme, l’homme se structure beaucoup plus par ce qui l’inquiète que par ce qui le rassure’. La voyance éclairerait sur cet au- delà, toujours inquiétant comblé par notre ESPERANCE qui donne un sens à la vie de l’etre. Dr. Raymond Messanvi JOHNSON Psychiatre ; Psychanalyste Conseiller en santé mentale et Ancien Président d’honneur de l’INAD

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